Contrôle et réglage du jeu aux soupapes
Ce tutoriel reprend certaines parties et conseil de l’article de Pascal sur :
les7pechesdumotard
Pourquoi faut-il le faire ?
Les matériaux bougent et donc le jeu aussi. Des pièces peuvent s’user, le siège des soupapes peut se tasser, etc. Le jeu bougera plus sur une moto refroidie par air et aux grosses soupapes (un gros mono comme la 600XT) que sur celles à refroidissement liquide et aux petites soupapes.
Lorsque le jeu est trop grand on peut l’entendre à l’oreille (petit cliquetis dû à la mise en vitesse de la soupape non progressive), mais pas quand il est trop faible. Or il vaut mieux un jeu trop grand que trop faible, car si la soupape n’a pas de temps de repos sur son siège, l’échange calorique ne se fera pas et la soupape finira par griller ! Ce jeu trop faible est aussi mauvais pour le siège de la soupape, qui se dégrade à vitesse grand V (ce qui fait perdre en compression, rend les démarrages laborieux, etc.)
Un jeu trop grand n’est pas sans conséquences non plus, on risque de mater queues et sièges de soupapes (mais c’est moins destructeur). Enfin bref… il faut le bon réglage avec une légère préférence pour être au maximum du jeu prescrit que l’inverse.
On lit parfois que si on ne sait pas faire le réglage, on peut quand même faire le contrôle soi-même et ensuite faire régler la moto pour un professionnel si besoin. Cela ne paraît pas cohérent car pour contrôler le jeu aux soupapes, il faut déjà faire le démontage et le positionnement du moteur au point mort haut de combustion et il faut une certaine habitude pour sentir avec les cales si elles passent bien (on dit parfois « grassement ») ou si elle « grattent » ce qui indique que le jeu est légèrement inférieur à l’épaisseur de la cale. Donc, si on sait déjà faire tout ça, le réglage n’est pas un problème d’autant qu’il ne faut pas d’outillage spécial !
Alors, motivé ?
Chaud bouillant pour régler le jeu aux soupapes ? Avant tout, ce ne doit pas être le cas du moteur : le jeu se contrôle et se règle moto absolument froide. La chaleur dilate les pièces et fausserait le contrôle.
Même si il est détaillé, cet article est un complément à ce que vous pourrez lire dans la revue moto technique (RMT) ou dans le manuel d’atelier (on trouve «1990 XT 600 Service manual » en anglais facilement et gratuitement sur internet).
Accès aux culbuteurs
L’accès aux culbuteurs est facile sur les 600 XT : déposer la selle et le réservoir et les carters d’accès aux culbuteurs sont accessibles. Le démontage du cache côté admission (côté carburateur) peut nécessiter de tapoter avec un bout de bois pour le décoller. Le joint est en caoutchouc et réutilisable tant qu’il n’est pas séché (c’est à dire qu’il est encore élastique sous la pression d’un ongle par exemple - sans l’abimer bien sûr). Côté échappement, dévisser les deux caches avec une clé de préférence à œil de 17 mm. À droite, attention de ne pas abimer le câble de compte-tours si vous devez forcer pour dévisser.
Calage au Point Mort Haut
L’accès à l’extrémité du vilebrequin pour chercher le point mort haut est lui aussi très simple : une trappe en plastique se dévisse au centre du carter gauche. Ne pas utiliser un tournevis plat qui l’abimerait mais plutôt une grosse rondelle ou autre pièce métallique arrondie qui rentre dans la fente et permet de répartir l’effort sur le plastique :
Attention, si la moto est sur sa béquille de l’huile risque de couler par cette ouverture. Placer une cale sous la béquille pour que la moto soit à peu près à l’horizontale (mais attention dans ce cas elle est moins stable) ou l’appuyer sur autre chose pour la faire pencher vers la droite, ce qui facilitera l’alignement du repère de point mort haut (PMH) et évitera toute fuite d’huile. Il n’est pas nécessaire de vidanger.
Sur le même carter gauche, ouvrir le regard vers le repère de PMH (tête de vis en haut à gauche). Pour ne pas endommager la fente de la vis, utiliser un gros tournevis plat avec emplacement (six pans ou carré) pour le faire tourner avec une clé plate :
Tout étant accessible, il faut maintenant se caler sur le bon PMH : celui de combustion.
Les soupapes s’ouvrent et se ferment tous les deux tours de piston correspondants aux quatre temps du moteur : admission, compression, combustion (aussi appelée explosion), échappement. Au point mort haut correspondant l’explosion, toutes les soupapes sont fermées et leurs ressorts détendus, les culbuteurs n’appuyant pas dessus. Il y a une autre PMH correspondant à la fin de l’expulsion des gaz d’échappement poussés par le piston qui remonte et au début de l’admission du mélange air-essence aspirés par le piston qui redescend. À ce moment-là, les soupapes sont ouvertes, poussées vers le bas par les culbuteurs et il n’est donc pas possible de mesurer le jeu entre soupapes et culbuteurs :
animation moteur à 4 temps
Pour cela, sur la 600 XT, on tourne le vilebrequin
dans le sens inverse des aiguilles d’une montre avec une clé à pipe de 19 mm. On d’ailleurs peut voir le mouvement des culbuteurs sur les soupapes. Nous recherchons le moment où tous les culbuteurs sont relevés : tournez jusqu’à avoir le repère de calage bien positionné : on doit voir la marque « I » sur le volant à l’intérieur du carter positionnée en face du repère du carter gauche. C’est là qu’il est pratique d’avoir penché la moto sur le côté droit (mais sans l’allonger par terre !) pour bien voir la marque, d’autant qu’elle est sur la partie arrière du volant et non celle qui est la plus visible:
Il ne faut pas revenir en arrière si vous dépassez la marque car, compte tenu du jeu dans la chaîne de distribution qui entraine l’arbre à came, le positionnement ne serait pas bon. Donc si vous dépassez… c’est reparti pour un tour (ou deux). Ceci étant dit, la période pendant laquelle les deux soupapes sont fermées correspond presque à un tour complet (tout le temps de compression avant le PMH, puis celui de la combustion), il y a donc de la marge à partir du moment où les soupapes se ferme.
Lorsqu’on est au bon point mort haut, il doit y avoir un peu de jeu dans les culbuteurs : vous devez pouvoir les faire bouger très légèrement entre deux doigts :
Replacez le cache central en plastique d’accès à la queue de vilebrequin pour éviter les fuites d’huile si vous bougez la moto.
Contrôle du jeuOn a maintenant accès aux culbuteurs et les soupapes sont complétement fermées. On peut enfin contrôler et si nécessaire régler le jeu entre culbuteurs et soupapes Sur nos 600 XT, l’opération est simple car s’agissant d’un monocylindre toutes les soupapes sont fermées en même temps. Sur un multicylindre c’est une autre affaire…
Pour les 3TB (et j’espère aussi pour les 4PT mais je n’ai pas de source sure pour vérifier), le jeu est de :
- admission 0.05 - 0.10 mm
- échappement : 0.12 - 0.17 mm
Le jeu donné à l’échappement est supérieur au jeu à l’admission car les soupapes d’échappement travaillent à des températures élevées et se dilatent plus. Il faut que, même très chaudes, il reste un peu de jeu.
Avant de tester le passage des cales d’épaisseur qui servent au contrôle, relevez du bout du doigt les culbuteurs vers le haut pour bien mesurer le jeu maximum.
Pour contrôler le jeu sur les soupapes d’admission il faut donc que la cale de 5 (soit cinq centièmes de mm) passe facilement et que celle de 10 ne passe pas ou alors « en grattant » un peu. Sur certaines cales il y a de légères stries qui permettent de mieux sentir si elles passent « serré » ou largement :
Pour contrôler le jeu sur les soupapes d’échappement, à moins d’avoir des cales de 12 et 17 (je ne sais pas si ça existe), il faut donc que la cale de 10 passe très largement, que celle de 15 passe sans « gratter » et que celle de 20 ne passe pas. Rappelez-vous : il vaut mieux un petit peu trop de jeu que pas assez :
Attention, les cales plus épaisses (15, 20) sont suffisamment rigides pour forcer le passage entre culbuteur et soupape. En insistant un peu on peut donc faire passer une cale de 20 alors que le réglage est bon entre 0,15 et 0,17mm. C’est là que le métier fait la différence. La cale doit trouver le passage sans devoir pousser trop fort (mais comme on a du mal à la présenter bien à plat et juste au bon endroit il faut tout de même tâtonner du bout de la cale).
Si vous n’avez pas l’habitude, passez les cales de 5, de 10 et de 15 pour apprendre à sentir les différentes sensations entre passer large et passer serré.
De toute façon, on peut partir du principe que le jeu était bon à l’origine et que si quelque chose a changé c’est un peu plus de jeu dû à l’usure donc la cale de 5 devrait toujours passer large et celle de 10 à l’échappement.
Passez les cales plusieurs fois pour être bien sûr et jouez sur leur flexibilité pour les présenter le plus à plat possible (sans tordre au point de les aimer ce qui pourrait les fausser)
Réglage du jeuS’il s’avère que certaines de vos soupapes ont un jeu qui n’est pas dans la plage de tolérance indiquée plus haut… il faut régler ! Pas d’inquiétude, si vous en êtes là vous saurez faire.
Pour régler, débloquer le contre-écrou d’un quart de tour environ avec une clé de 10 puis dévisser également d’environ un quart de tour le petit carré au centre. Glisser alors la cale égale ou immédiatement supérieure au jeu maximum voulu (à l’échappement placer la cale de 20, à l’admission celle de 10). Revissez ensuite très délicatement le petit carré pour venir au contact de la cale. Vous pouvez vous fabriquer un outil avec une petite pièce en métal et en y faisant une encoche de 3 mm (j’ai réutilisé un outil de montage de meuble en kit et fait deux encoches à la disqueuse pour guider le carré quelque-soit son orientation) :
Revissez enfin le contre-écrou (en maintenant le carré si vous vous êtes fabriqué l’outil idoine). Ne forcez pas comme une brute : si vous n’avez pas de clé dynamométrique pour serrer à 14 Nm, en tenant la clé plate de 10 à l’autre extrêmité entre deux doigts (et non pas la clé à pleine main) serrez au maximum cela devrait être à peu près bon.
Après avoir vérifié qu’il y a toujours un peu de jeu dans le culbuteur et l’avoir poussé vers le haut pour avoir le jeu maximum, vérifiez maintenant que le jeu est bien réglé avec la cale d’épaisseur inférieure et celle d’épaisseur supérieure comme vu précédemment au paragraphe "contrôle". Vérifiez deux fois.
Répétez l’opération sur les quatre soupapes et faisant attention de ne pas faire tourner le moteur (donc boîte de vitesse au point mort, pas de démarreur ou kick ou quoi que ce soit qui puisse faire tourner le moteur pendant toute l’opération). Si vous avez un doute, vérifier l’alignement des deux repères dans l’ouverture prévue à cet effet.
RemontageRefermez tout en nettoyant les plans de joint avec un chiffon propre et, encore une fois, sans serrer trop fort. Même si vous avez eu du mal à débloquer les caches d’accès aux soupapes, cela ne veut pas dire qu’il faut les serrer comme un malade. Dès lors qu’un joint torique est présent, le serrage doit être modéré. Inutile également de mettre de la pâte à joint. Si il y a une fuite, changez le joint au lieu de prendre le risque d’envoyer de la pâte à joint se promener dans le moteur et boucher des petites conduits.